1. L’expression « taux de profit » tout court prête souvent à confusion.
C’est notamment le cas dans un contexte qui n’indique pas si le taux de profit considéré est sur capital, sur chiffre d’affaires ou sur valeur ajoutée.
2. Convenons de dire :
Avec C de capital, V de ventes ou de valeur ajoutée, P de profit :
● le taux de profit sur capital (P/C) mesure la rentabilité du capital ;
● le taux de profit sur ventes (P/ V) mesure une profitabilité de l’activité considérée.
3. Ce choix de vocabulaire facilite la prise en compte de deux faits.
Premier fait : les taux P/C et P/V ayant le même numérateur, un troisième terme règle leur rapport : P/C = P/V fois V/C.
Deuxième fait : rien n’autorise à admettre qu’un taux de profit P/C varie en toute circonstance dans le même sens que le taux de profit P/V correspondant. Leur rapport V/C mesure une productivité dont l’évolution fait s’attendre à ce que les tendances de longue période qui affectent chacun des deux taux de profit soient souvent en sens contraire.
4. Comme existent deux taux de profit, deux familles de taux de marge existent.
L’une est celle des taux de marge sur stock, l’autre est celle des taux de marge sur flux. Le profit étant une marge finale, un taux de profit sur capital est un ratio de la famille des taux de marge sur stock et un taux de profit sur ventes est un ratio de la famille des taux de marge sur flux.
5. L’emploi du mot « rentabilité » pour désigner aussi bien un ratio de la première famille que de la seconde prête à confusion.
Un moyen de distinguer ce qui doit l’être use du mot « rentabilité » en le faisant suivre d’un qualificatif. Des taux de marge sur stock, et avec eux les taux de bénéfice et de profit sur capital, on dit qu’ils sont des « rentabilités financières ». Des taux de marge sur flux, et avec eux les taux de bénéfice et de profit sur chiffre d’affaires, on dit qu’ils sont des « rentabilités commerciales » ou « économiques ».
6. Ces qualifications sont fallacieuses et inefficaces.
Le financier est, pour le meilleur et pour le pire, un sous-ensemble strict de l’économique. Ce qui est commercial n’est pas non financier, même en cas d’apports en nature et de troc. En réalité, très nombreux restent les cas dans lesquels une marge exprimée en proportion d’un stock ou d’un flux continue à être appelée « rentabilité » tout court. C’est ainsi que les faibles taux de marge sur ventes sont fréquemment tenus pour être les moins rentables alors qu’il arrive souvent que les taux de ces mêmes marges sur investissement sont les plus forts.
7. Il vaut mieux en venir à n’appeler « rentabilité » qu’un ratio de la famille des taux de marge sur stock et « profitabilité » qu’un ratio de la famille des marges sur flux.
Dans cette convention, un bénéfice et un profit sur capital sont des rentabilités, tout comme le sont des taux de marge brute sur stock en commerce de détail ou de gros. Le même bénéfice ou profit sur chiffre d’affaires ou valeur ajoutée est une profitabilité, tout comme un taux de marge brute unitaire sur prix d’achat ou de vente.
8. Nous constaterons plus avant que ces définitions de la rentabilité et de la profitabilité aident à dégager deux lois économiques de grande importance.
En première approche, ces définitions aident, en gestion d’entreprise, à éviter des erreurs encore très fréquentes. Pousser les activités les plus profitables expose, en effet, à augmenter la part relative des activités les moins rentables. Face à l’érosion du taux de bénéfice sur chiffre d’affaires qui en résulte, c’est alors supprimer des emplois pour redresser la barre qui peut finalement s’imposer.